Plusieurs essais cliniques dans la maladie de Fabry sont en cours ou vont être lancés pour des approches thérapeutiques différentes ou complémentaires de celles actuellement proposées (enzymothérapies substitutives et molécule chaperon).
Thérapie par inhibition de substrat
Son principe est de réduire la production des substances qui s’accumulent. Deux molécules, à prise orale, et dont l’action est de limiter la production de glucosylcéramide, molécule précurseur des substances s’accumulant dans la maladie de Fabry, sont actuellement en essai clinique.
Le laboratoire Sanofi-Genzyme évalue sa molécule « GZ/SAR402671 ». Une phase 2, lancée en avril 2015, avait pour objectif premier d’évaluer la capacité de cette molécule à réduire l’accumulation de GL-3 dans les cellules endothéliales des petits vaisseaux sanguins (capillaires) de la peau. A notre connaissance, les résultats de cette étude n’ont pas encore été publiés. Une phase d’extension à la phase 2 est en cours avec comme objectifs premiers d’évaluer la sécurité du produit administré et les changements dans certaines mesures cliniques.
Le laboratoire Idorsia Pharmaceuticals vient d’annoncer l’inclusion du premier patient de son essai clinique de phase 3 en vue d’évaluer l’efficacité de sa molécule Lucerastat. Les conclusions de la phase 1b ont été publiées dans le Lysosome.Info de novembre 2017 (N° 160). L’essai de phase 3 se fait en double aveugle contre placebo durant 6 mois, avec une répartition aléatoire de 2 malades traités par Lucerastat pour 1 malade sous placebo. Ni les participants ni les médecins ne savent qui reçoit le traitement ou le placebo. Après 6 mois, les participants pourront participer à une phase d’extension où tous recevront le traitement. L’objectif premier de cette essai est de diminuer la douleur neuropathique décrit par de nombreux patients Fabry.
29 sites sont ouverts dans 9 pays afin de permettre l’inclusion, qui vient donc de débuter, d’une centaine de malades. En France, cet essai clinique est conduit à l’hôpital de Garches (région parisienne) par le Professeur Dominique Germain. Parmi les critères d’inclusion, les malades ne doivent pas être sous traitement enzymatique de substitution ou s’engagent à arrêter celui-ci durant environ 8 mois. Les hommes comme les femmes peuvent y participer à condition d’être âgé d’au moins 18 ans. D’autres critères d’inclusion/exclusion sont conditionnés par l’état d’évolution de la maladie.
Entre le temps nécessaire à l’ensemble des inclusions et les 6 mois de suivi, l’essai est prévu pour une durée de 20 mois (les résultats ne seront donc pas connus avant février 2020 au plus tôt).
Thérapie génique par modification des cellules souches
Le laboratoire AvroBio est en cours de recrutement en Australie pour son essai clinique de phase 1-2. Le principe est de prélever chez le malade des cellules souches, qui sont modifiées en laboratoire par une technique de thérapie génique afin de leur permettre d’exprimer l’enzyme AGA (alpha galactosidase A). Ces cellules souches sont ensuite réintroduites chez le malade selon le principe d’une greffe.
Il est prévu d’inclurent entre 8 et 12 patients masculins, âgés de 16 à 40 ans, naïfs de tout traitement. Plusieurs critères d’inclusion/exclusion sont conditionnés par l’état d’évolution de la maladie (fonction rénale, troubles cardiaques, accident vasculaire cérébral, entre autre). La durée de l’étude est estimée à 58 semaines environ (un peu plus d’un an) pour chaque participant. L’objectif premier est d’évaluer la sécurité de ce traitement.
Thérapie par modification d’expression des gènes
Elle se base sur l’épigénétique, c’est-à-dire sur l’étude des mécanismes qui modifient l’expression des gènes sans en changer leur « écriture ». Toutes les cellules d’un individu possèdent le même patrimoine génétique mais elles l’expriment de façon très différente selon le tissu auquel elles appartiennent ou selon des facteurs environnementaux. C’est le principe de l’adaptation à son environnement (interne ou externe). Par exemple les œufs de tortue selon la température externe peuvent donner des tortues mâles ou femelles.
En médecine cela ouvre de nouvelles perspectives thérapeutiques à l’aide de médicaments que l’on va appeler « épi-médicament ».
Le laboratoire Resverlogix Corps a prévu de lancer prochainement un essai clinique de phase 1-2 (prévision octobre 2018) au Canada pour sa molécule RVX 000222. Utilisée dans d’autres essais cliniques de phase 1-2, cette molécule a montrée qu’elle modifiait de façon significative l’expression de différents marqueurs liés aux troubles cardiovasculaires. Elle agit donc sur l’expression d’une variété de gènes lui conférant un potentiel de thérapie complémentaire à l’enzymothérapie pour les patients Fabry. Il s’agit d’un traitement oral, il est prévu d’inclure 16 participants, hommes ou femmes malades de Fabry, âgés de 18 à 75 ans. Deux groupes seront constitués, l’un composé de patients traités sous enzymothérapie depuis au moins 6 mois, l’autre de patients naïfs de tout traitement. Bien entendu, des critères d’inclusion/exclusion autres existent, basés sur différents éléments d’évolution de la maladie.
[/Delphine GENEVAZ/]